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Par(en)thèse
3 mars 2010

Séminaire 9 Mars 2010

Séminaire Par(en)thèse

L’objet de la recherche en Lettres et Sciences Humaines et Sociales

Mardi 9 Mars 2010

17h-19h

Salle A 217

Campus Lettres et Sciences Humaines

 Jean-Baptiste Eczet (EPHE) 

Entre interprétation et formalisation : comment comprendre la poésie Mursi ?

La poésie Mursi s’exprime dans l’anthroponymie et dans des poèmes chantés, appelés zilüe. Les noms sont des déclinaisons infinies de couleurs et de motifs appartenant à l’individu et particularisent chaque relation. Un Mursi a donc autant de noms que de rapports possibles avec les autres. Les zilüe sont le plus souvent chantés lors de rituels et décrivent les réseaux relationnels selon des correspondances de couleurs. Chacun possède son propre zilüe, parfois même plusieurs. Dans ces poèmes, de nombreux procédés linguistiques sont utilisés comme la métaphore, les sens cachés et les évocations multiples, et sont autant de difficultés pour le chercheur qui veut comprendre pourquoi une femme finit en pleurs après avoir chanté l’histoire d’un insecte rayé.

Nous pouvons étudier les représentations qui sous-tendent cette poésie et les réalités qu’elle crée, c'est-à-dire le contexte culturel et le contexte d’énonciation. Les analyses linguistiques et structuralistes permettent, par exemple, de dégager des schèmes récurrents dans ces poèmes, comme les rouages mécaniques d’une « machine à évocation ». Mais comment aborder un objet qui est avant tout ressenti par les acteurs ? Comment parler d’émotions poétiques avec la distance nécessaire du chercheur, sans réduire le zilüe à un simple mécanisme cognitif ou à une structure de texte ? 

En se fondant sur une ethnographie détaillée, nous proposons une analyse de l’anthroponymie et des poèmes Mursi en faisant ressortir les différentes étapes de la recherche, qui sont autant de méthodes et de positionnements différents. La récolte systématique de données et l’étude de récits de vie, la reconstruction d’une classification culturelle, et, enfin, l’observation participante et l’observation « partie prenante » sont autant de moyens nécessaires pour comprendre quelques lignes d’un poème, pourquoi la brume rappelle l’oiseau bleu et un échange de bétail, et pourquoi Taureau Noir s’appelle aussi Terre de Métal… Ainsi, pour saisir cet objet aux multiples dimensions, il est nécessaire de s’y adapter en multipliant aussi les approches.

La poésie Mursi constitue un objet de recherche particulier car elle s’inscrit dans une relation entre subjectivité de l’acteur et concept culturel. Son étude reflète bien la nécessité pour le chercheur en sciences humaines et sociales de toujours s’adapter à son objet, selon les données empiriques, pour le découvrir pleinement.

Jean-Baptiste Eczet est doctorant à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, section des sciences religieuses, à Paris, sous la direction de Michael Houseman. Il a effectué quatre séjours dans la vallée de l’Omo chez les Mursi depuis 2006. Il a été conférencier pour l’exposition « Couleurs sur corps », organisée par le CNRS en 2008 et pour le Musée Royal d’Afrique Centrale de Tervuren, dans le cadre de l’exposition « Omo. Peuples & Design », en 2009.

 

 

 

 

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